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20 août 2007 1 20 /08 /août /2007 09:20


-16 Août 1968: Mi-parcours entre la France et les Indes.

Située à 1232 m au pied de la chaîne de l'Alborz non loin de la mer Caspienne, Téhéran est une immense ville de plus de deux millions d'habitants. Ses rues sont parcourues sans relâche par des bus impériaux rouges et de très nombreux taxis. L'agglomération s'étale largement sur le rebord d'un plateau aride, doucement incliné vers le désert au sud. Le quartier résidentiel Chémirânt est situé au nord sur le premier contrefort de l'Alborz, tandis que le bazar et les quartiers pauvres sont construits plus au sud. 

 

Le commerce du tapis est très important et des avenues entières sont consacrées à la vente en boutiques luxueuses où sont exposés les plus beaux tapis persans.

La nuit est tombée lorsque la Mercédès s'arrête au centre de la ville. Nous descendons sur un boulevard où des jeunes très européanisés attendent l'ouverture d'un cinéma. Très rapidement, nous trouvons un petit hôtel tout près du Continental dont j'avais récupéré l'adresse au Gûlhane.



 

 

 

 





 






Les trois mille kilomètres qui nous séparent désormais d'Istanbul représentent la moitié du chemin à parcourir pour atteindre l'Inde. Nous pensions les parcourir en trois semaines et nous avons mis sept jours et six nuits. De plus, le peu d'argent restant au départ n'a pas été dépensé. Il va servir à régler le prix de la chambre. En cours de route, nous avons perdu du poids. Je ne pèse pas plus de cinquante kilos. Eddo, qui n'en fait guère plus doit effectuer son rappel du vaccin anticholéra à l'institut Pasteur. Nous resterons à Téhéran deux ou trois jours le temps de nous reposer un peu.

Notre première visite est pour la poste centrale. Je suis ravi, avec quatre lettres, je sais que l'on pense à moi et cela m'encourage. Toutes montrent leur stupéfaction, chacun mesurant la hauteur de mon ambition. L'une d'entre elles est signée de Rose, ma soeur de 12 ans qui m'écrit d'une colonie de Vayrac

<< J'espère que tu vois de beaux pays. Ce matin, on a fait un concours de pêche, mon moniteur (Michel) m'a prise comme coéquipière. Il l'a fait exprès (pour que j'attrape les asticots). bons baisers. >>


La deuxième est de ma cousine Monique qui m'écrit de Monthermé dans les Ardennes

<<J'aimerais bien être à ta place car tu fais un très beau voyage, si tu continues comme ça, un de ces jours on te retrouvera sur la lune, grosses bisses de ta petite cousine>>

  La troisième est de Jean-Marie et Pierrot son cousin.

<<Je suis revenu à Montargis par la force des choses, j'ai été expulsé d'Italie mais je repars vous rejoindre à istanbul. Demain Pierrot et Annita vont aller en Ecosse et nous vous rejoindrons au gûlhane hôtel dans un mois environ. Il faudrait que tu reviennes en arrière car à Téhéran il sera impossible de se retrouver, alors que si dans un mois environ tu te trouvais à Istanbul, nous pourrions repartir à quatre. Je vais te quitter, et mes félicitations, je n'en reviens pas,si tu voyais nos tronches à tous, tu te poilerais un peu>>

C'est vrai que ce serait formidable de se retrouver tous les quatre, mais il n'est pas pensable de faire demi-tour maintenant. La dernière est de ma mère qui me réclame ma dernière fiche de paye afin de toucher les allocations. Elle m'apprend également qu'un mandat de cent francs est parti pour Téhéran. A cette nouvelle, je retourne au guichet et réclame ce dernier à la préposée. Malheureusement, il n'est pas arrivé, je suis déçu.

La chaleur est montée brusquement en fin de matinée. Un sandwich avalé, nous sommes consignés à la chambre pour une sieste forcée. La température atteint maintenant quarante degrés au thermomètre de la pièce. Je n'ai jamais eu si chaud de ma vie. La fenêtre grande ouverte, nous suons à grosses gouttes. Chaque mouvement devient impossible. Pourtant, j'en profite pour répondre aux courriers et demande à mes parents de m'envoyer les lettres à la poste restante centrale de Kabul.
       La canicule retombée, nous sortons découvrir Téhéran. Les rues sont encombrées de nombreuses Mercédès anciens modèles. Il n'y a pas de chevaux comme à Istanbul mais le bruit de la rue est aussi intense.


Aujourd'hui, après une nuit torride, j'accompagne Eddo à l'institut Pasteur. Restant dehors à l'attendre aux pieds des grilles, je grave dans l'écorce d'un gros platane mon nom et prénom à l'aide de mon cran d'arrêt. J'ai déjà une certaine nostalgie du voyage. Peut-être qu'un jour, je reviendrai revoir cet arbre.

De retour, nous passons à la poste. Hélas le mandat n'est toujours pas là. Il nous reste juste de quoi payer l'hôtel pour cette nuit et acheter un ou deux sandwichs. A la chambre, je me lance dans la couture. Mon lewis rouge, acheté aux carreaux du temple à Paris, a rendu le fond. Je le rajeunis comme je peux avec une belle pièce de tissu bleu. Ce n'est pas folichon mais tant pis, je n'ai vraiment pas le choix.
       Le jour suivant, une visite de la dernière chance à la poste s'avère infructueuse. Ce mandat est extrêmement important, je suis démoralisé et
un peu furieux. J'ai l'impression que le personnel ne s'intéresse guère à mon problème et je demande à voir un responsable. Je suis sûr que le mandat est ici, ma mère me l'a envoyé en même temps que la lettre et elle date du trente et un juillet. Devant mon insistance, le chef de service m'invite à le suivre dans les étages. Divers services sont visités mais à mon grand regret les recherches sont veines. Je repars bredouille terriblement déçu. Il n'est plus possible d'attendre, cela à un coup. Demain nous partirons sans le sou. Je renvoie alors un courrier à Montargis informant mes parents que je n'ai pas reçu l'argent et qu'ils aient la gentillesse d'envoyer un autre mandat à Kabul.


 

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